Panégyrique de monsieur Léon FRANCOIS.
(A droite Léon François et à gauche Raphaël Mallard son compagnon d'infortune.)
Pour toi, l’ami de jeunesse de mon père, c’est un grand honneur que d’être le panégyriste de l’homme d’exception que tu as été et que tu resteras dans nos mémoires.
Le parcours de toute ta vie ne cessera pour nous d’être un exemple caractérisé par ces 3 valeurs :
PATRIOTISME-COURAGE et MODESTIE.
Né à PARIS le 2 Juin 1918, après une éducation studieuse en Italie, ta famille décide de s’installer Aux ANDELYS en 1929 où tu continues tes études. Tu auras dans cette cité un camarade de classe de ta trempe ayant les mêmes valeurs, un certain Marcel LEFEVRE. Comme lui, tu effectues ton service militaire en 1938 alors que tu es entré dans la vie active à la société HOLOPHANE depuis 1931.
Mobilisé en 1938, à CHERBOURG, après diverses affectations, tu participes avec le 405ème régiment de D.C.A. à la campagne de BELGIQUE.
Tu es démobilisé le 30 Septembre 1941 à LYON.
A l’issue des combats, tu ne pourras admettre l’affront de la défaite.
Marié en 1942, tu n’es pas de nature à t’adapter à l’apathie pétainiste qui va se généraliser pour une grande partie des Français.
Tu es né avec des convictions, tu ne peux accepter l’inaction envers l’occupant. Tu t’engages dans la Résistance en 1942 alors que tu es commerçant en primeurs Aux ANDELYS.
D'abord comme agent de liaison sous le pseudonyme de Jacques FLEURY, à l’Organisation Civile et Militaire. Tu es nommé Chef de Groupe, puis Lieutenant au réseau F.F.I. Libération Nord, secteur Seine Inférieure jusqu'en 1944. Tes activités vont notamment consister en des actes de sabotage sur du matériel militaire ennemi, des missions de renseignement et de transport d’armes dans le secteur LILLEBONNE. A cette date, sur dénonciation, tu es capturé à la suite d’un violent engagement armé avec les Allemands à LILLEBONNE dans la ferme de la famille MALLARD où tu as rencontré un résistant comme toi Raphaël, allias Raymond MORAND qui va devenir ton compagnon d’infortune jusqu’à votre retour d’Allemagne.
Avec Raphaël qui ne te quittera plus, vous êtes dirigés sur ROUEN.
Entravés dans le vieux donjon de la ville, vous êtes ensuite dirigés vers la prison Bonne Nouvelle où les SS sont équipés pour des interrogatoires très particuliers.
Torturés pendant six jours, ceux-ci finiront par vous extorquer de fausses informations qui par chance ne pourront être vérifiées du fait de l’avance rapide des alliés en NORMANDIE.
Enchainés aux mains et aux pieds malgré vos innombrables blessures, vous êtes dirigés en camion vers le camp de Royallieu de COMPIEGNE.
En 1944 en pleine canicule, entassés jusqu’à 120 dans des wagons à bestiaux, vous voyagez dans des conditions d’hygiène indescriptibles. Le train vous emmène vers l’est.
Vous n’arriverez pas tous vivants en Allemagne. Après WEIMAR, direction BUCHENWALD.
Pour beaucoup le voyage s’arrêtera là.
Dès votre arrivée, le 12 Septembre 1944, vous êtes tondus intégralement, passés au grésil avant de toucher la tenue rayée pour ensuite prendre la direction des mines de sel et de phosphates de STASSFURT.
Faim, soif, dysenterie, intense fatigue vont être le quotidien de vos harassantes journées au fonds de la mine. Travailleurs de force sous les coups des kapos.
Ce séjour dans la mine durera jusqu’en 1945, date à laquelle HITLER ordonnera d’évacuer les camps pour ne pas laisser de traces des atrocités commises.
Cette évacuation va avoir lieu au moment où va s’effectuer la jonction des troupes Russes et Américaines. Elle est programmée à pied, encadrée par des « S.S » qui ont pour directives de fusiller ceux qui tenteraient de s’échapper et d’achever ceux qui ne pourraient pas suivre sur les 366 kilomètres que durera le parcours.
Ce sont des squelettes ambulants qui quittent la mine pour un cauchemar imprévisible.
A juste titre elle sera connue sous le vocable de marche de la mort.
Les souffrances indescriptibles que tu vas endurer avec tes camarades de NEU-STASSFURT à ANNABERG jusqu'en 1945 vont rester à jamais gravées dans ta mémoire. 129 déportés périront au cours de cette marche à laquelle l’avance de l’armée rouge mettra fin.
Vous serez évacués par les Soviétiques vers les forces Américaines, puis c’est enfin le retour où tu seras accueilli à PARIS à l’hôtel LUTETIA.
De retour au pays, les Andelysiens ne pourront oublier ton arrivée. Ton allure chancelante et ta mine cadavérique (tu pèses 40 kilos) vont stupéfier les Andelysiens venus t’accueillir ne pouvant imaginer ce que tu as enduré.
Tu retrouves ton épouse Simone.
Après une longue période nécessaire au rétablissement de ta santé, tu tiendras avec ton épouse un commerce de fruits et légumes de 1946 à 1947.
Deux enfants Daniel et Jacqueline naîtrons de vôtre union.
Conseiller Municipal de 1959 à 1965, tu vas donner la pleine mesure de tes qualités humaines exceptionnelles qui vont t’attirer la sympathie de l’ensemble de la population Andelysienne.
Ami et collaborateur de René TOMASINI premier Magistrat de la ville, tu assureras des postes à responsabilités au sein de l'équipe municipale jusqu’en 1983 date à laquelle tu prendras ta retraite.
Fidèle à tes convictions et sans jamais faire état de ton passé, tu seras présent à toutes les manifestations patriotiques où tu représenteras les Résistants. Tu ne peux oublier c eux qui ne sont pas revenus.
Ton glorieux passé va continuer à te rattraper. Après avoir été fait Chevalier puis Officier, c'est en 1975 que tu reçois la cravate de Commandeur de la Légion d’Honneur au titre du Ministère des Anciens Combattants.
Cette très haute distinction va élargir le cercle de tes relations.
Celles-ci, et ton implication au sein de la Municipalité vont être déterminantes pour l’aboutissement d'un projet de création d'un Mémorial NORMANDIE-NIEMEN aux ANDELYS.
En 1985, tu vas perdre ton épouse Simone.
Dans tes moments de solitude, depuis le décès de ton épouse, tu trouveras beaucoup de sollicitude auprès de tes enfants Daniel et Jacqueline qui viennent régulièrement t’apporter leur soutien.
La Nation va te décerner les décorations suivantes :
- Commandeur dans l'Ordre National de la Société de la Légion d'Honneur.
Tu vas obtenir deux citations pour faits d'armes lors du deuxième conflit mondial.
La première à l'Ordre du Régiment avec :
- La Croix de Guerre,
La seconde à l'Ordre de la division comportant attribution de :
- La Croix de Guerre avec Etoile d’Argent.
- La Médaille des Evadés.
- La Croix du Combattant Volontaire 1939-1945.
- La Croix du Combattant Volontaire de la Résistance.
- La Médaille de la Résistance Française.
La Nation au titre du Ministère des Anciens Combattants et Victimes de Guerre t’a attribué les titres de Déporté Résistant, de Combattant Volontaire de la Résistance et de Combattant de la Guerre 1939-1945.
En 1987, lors d’une affection t’obligeant à être alité, tu seras soigné par Geneviève, une infirmière à qui tu vas te confier. Elle même veuve d'un Résistant est pupille de la Nation Elle comprend mieux que quiconque ta solitude. Geneviève fera tout pour te rendre la vie plus facile et plus sereine, vous allez former un heureux couple.
En 2012 tu vas être de nouveau confronté à de terribles épreuves.
Tu vas perdre successivement, ta petite fille Valérie et ton fils Daniel. Tu as 94 ans et cette disparition va beaucoup te diminuer moralement. Dernièrement en Avril 2015 tu es encore frappé par la disparition de ton gendre.
Cela ne va pas entamer tes convictions, tu vas inlassablement transmettre à tous la leçon d’histoire que tu as vécue en faisant des conférences dans les écoles.
Membre de droit des Associations des Combattants Volontaires de la Résistance et des Forces Françaises de l'Intérieur, de l'Association Départementale des Déportés Internés Résistants Patriotes ainsi que de la Société Nationale des membres de la Légion d'Honneur Décorés au Péril de Leur Vie, tu ne manqueras jamais de déposer une gerbe au monument au Morts des ANDELYS à la mémoire de tes compagnons disparus au cours de la cérémonie annuelle dédiée à leur attention.
Nous te devons encore plus de respect avec cette mission de transmission de ces moments vécus. Nos jeunes, grâce à la permanence de ton action seront mieux à même de parfaire leurs connaissances historiques et méditer sur le comportement de la nature humaine.
Nous ne te disons pas adieu, mais au-revoir LOULOU.